« Ne vel ignorancie vel potius invidie redarguas, mi germane, qui quinque [annos] apud Massiliam olim mecum studuisti, tui gracia et aliorum studentium hanc artem apetentium, tractatum quem tocies optaveras, qui mei memoriale posteris trado ab antiquorum nemine specialiter ductum vel editum : in quo sunt signorum stellarumque vires ; urine eciam non vise, cum egritudinibus, natura et exitu morbi judicium continetur. Unde et ab hoc ego, Guillelmus, natione Anglicus, professione medicus, ex sciencie merito astronomus, nunc autem civis Massilensis (sic), huic meo tractatui nomen imponendum censui... »

La Bibliothèque de Limoges compte actuellement vingt-cinq mille volumes imprimés environ : elle ne possède, en tout, que trente-neuf manuscrits, formant quarante-trois volumes ou liasses. Cette pauvreté, vraiment affligeante dans une ville où existaient autrefois un grand nombre d'établissements religieux, ne peut s'expliquer que par la dispersion, dès avant la période révolutionnaire, des documents les plus précieux conservés dans nos vieilles abbayes, et par la négligence des districts et des agents chargés de recueillir les dépouilles des bibliothèques conventuelles. Beaucoup de manuscrits intéressants ont été détruits ou ont passé, de 1790 à 1820, dans des collections particulières. Toutefois une seule de ces collections renferme aujourd'hui des ouvrages de valeur et peut offrir des ressources sérieuses aux études historiques ; c'est la bibliothèque du grand séminaire de Limoges. On y conserve en effet, outre les volumineux Recueils de l'abbé Nadaud et de l'abbé Legros, plusieurs manuscrits provenant des églises ou des confréries de la ville épiscopale et une partie de ceux qui se trouvaient à l'abbaye chef d'Ordre de Grandmont, lors de la suppression de ce monastère.

De toutes les bibliothèques monastiques de la contrée, celle de Saint-Martial était de beaucoup la plus importante ; il en restait encore, au commencement du XVIII^e siècle, de précieux débris qui furent acquis, en 1730, par la Bibliothèque du Roi (NOTE: Voy. L. DELISLE, le Cabinet des manuscrits de la Bibliothèque nationale, t. I, p. 387-395). Les autres monastères fondés avant le XIII^e siècle n'étaient riches ni en manuscrits ni en imprimés : c'est à peine si l'abbaye de Saint-Martin-lez-Limoges possédait, en 1790, 600 volumes. Des couvents, fort considérables, établis par les Ordres mendiants, un seul, celui des Carmes, avait une bibliothèque d'une certaine importance : elle ne comprenait pas moins de 1,800 volumes. Les Augustins en possédaient 500, et les Récollets de Sainte-Valérie 400 environ ; chez ces derniers se trouvaient de vieilles éditions dont, en 1750, D. Colomb avait apprécié le mérite. Au XVIII^e siècle, les trois bibliothèques qui passaient, avec celle du couvent des Carmes, pour les plus nombreuses de la ville, étaient celles du collége, du séminaire des Ordinands et du séminaire de la Mission ; mais elles ne renfermaient que peu ou point de manuscrits. Des collections particulières qu'on pourrait signaler, une seule en possédait : le cabinet de M. de Lépine, subdélégué de l'intendance, dont les richesses, transportées hors de la province, ont été perdues pour le Limousin.

Les manuscrits de la Bibliothèque de Limoges viennent un peu de partout : aucun fonds connu n'a formé le noyau de cette petite collection, qui a peu de chances de devenir jamais importante et qui ne s'est, depuis cinquante ans, accrue que de quelques acquisitions ou cadeaux sans grande valeur.

La Bibliothèque a gardé longtemps, et l'on voit figurer en tête de tous les anciens relevés des manuscrits, cinq volumes intéressants à divers titres et qui, en 1879, lors du transfert des services municipaux dans le nouvel Hôtel de ville et du classement des archives communales, furent réintégrés dans ce dernier dépôt. C'étaient, en premier lieu, le cartulaire du Consulat du château de Limoges, aujourd'hui AA 1 des archives communales, qui, outre un grand nombre d'actes et de notes en langue provençale (les plus anciens remontent à l'année 1208) (NOTE: C'est par erreur que M. Antoine Thomas, dans son Introduction, si remarquable d'ailleurs, à l'Inventaire sommaire des Archives communales de Limoges, signale, p. 4, les chartes portant la date de 1212 comme les plus anciennes des pièces datées qui existent dans ce manuscrit. Nous en relevons notamment une de 1208 au fol. 79 recto. Ajoutons qu'une partie de ces textes ont été publiés dans le Limousin historique (Saint-Yrieix, Noyer, 1837, in-8^o) et dans l'Histoire du Limousin : Bourgeoisie (Paris, Dumoulin ; Limoges, Ardillier, 1846, 2 vol. in-8^o), par M. Achille Leymarie, mais d'une façon assez défectueuse. La Société archéologique de Limoges prépare la publication intégrale de ce cartulaire). renferme plusieurs textes des coutumes locales, une curieuse série d'ordonnances somptuaires, des statuts corporatifs, et une collection de forléaux (prix légal des grains et du vin), allant de 1416 à 1635 ; — trois gros volumes d'actes et de délibérations du corps municipal de l'année 1508 à la Révolution (BB 1, BB 2, BB 3) (NOTE: Le premier et le second de ces registres ont été publiés par la Société archéologique et historique du Limousin. L'impression du troisième est commencée. Il existe à l'Hôtel de ville un quatrième registre antérieur à la Révolution BB 4 (1768-1790), qui n'a jamais été déposé à la Bibliothèque), — enfin le précieux registre de comptes de la confrérie du Saint-Sacrement établie en l'église de Saint-Pierre du Queyroix (GG 204). Ce volume, qui résume toute l'histoire de cette pieuse association, de 1550 au commencement du XVIII^e siècle, renferme un assez grand nombre de dessins dus à des artistes du temps : imagiers ou émailleurs, et représentant les objets d'orfévrerie et autres exécutés pour le compte de la confrérie et destinés à sa chapelle (NOTE: Plusieurs passages de ce manuscrit ont été publiés dans le Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, dans l'édition des Annales manuscrites de Limoges donnée en 1872 par MM. E. Ruben, F. Achard et P. Ducourtieux (Limoges, veuve Ducourtieux, in-8^o), et dans le Limousin historique, mentionné plus haut. Le volume est décrit, d'une façon assez sommaire, du reste, dans un ouvrage de M. Maurice Ardant, intitulé : Saint-Pierre du Queyroix de Limoges (Limoges, 1851, in-8^o, p. 62)).

Privée de ce notable appoint, la collection de manuscrits de la Bibliothèque de Limoges, bien qu'elle possède encore quelques volumes précieux, entre autres un antiphonaire dont on trouvera plus loin la description, est, dans son ensemble, médiocrement intéressante et ne répond ni au rôle de la cité dans le passé, ni à son importance dans le présent. M. Ulysse Robert a donné une liste de la plupart de ces manuscrits dans son Inventaire sommaire (p. 356-357).

Louis GUIBERT.